Faire remonter les tarifs. Voilà un objectif vers lequel tendent non seulement toutes les compagnies mais également tous les acteurs de la chaîne du transport aérien au premier rang desquels les aéroports. Il faut se refaire une santé après les deux années terribles vécues par le secteur. D’ailleurs, se profilent d’autres enjeux écologiques qu’il faudra bien résoudre à affronter et cela ne pourra se faire que par des recherches certainement coûteuses. Comment les financer ?
On peut toujours se tourner vers les gouvernements et leur demander les moyens économiques dont aura besoin le transport aérien. Il est fort douteux que dans l’époque actuelle, largement livrée au « bashing aérien», ils prêtent une oreille attentive à ce genre de sollicitations. Il faut donc trouver à l’intérieur de cette activité les ressources nécessaires à la fois pour regagner l’équilibre financier de tout le secteur, mais également pour financer les investissements nécessaires et ils seront sans doute colossaux. Inverser la tendance A partir de ce constat, quel modèle adopter pour entrer dans une spirale vertueuse qui permettra de répondre aux formidables défis qui attendent cette activité ? S’il est impossible de faire appel aux finances publiques, il faudra bien se résoudre à traiter cette question à l’intérieur même du transport aérien. Certes, celui-ci a fait d’énormes efforts pour se rationnaliser, ne serait-ce que pour survivre aux effets de la pandémie. Cela ne suffira certainement pas. Il faudra bien se résoudre à renverser la baisse tarifaire constante depuis un quart de siècle au moins. Elle a été d’ailleurs très utile pour populariser le transport aérien et promouvoir les échanges entre les populations dont personne ne peut douter de leur intérêt pour maintenir la paix entre les peuples. Mais il semble bien que l’on ait atteint le point le plus bas de la courbe en utilisant tous les artifices dont les transporteurs pouvaient disposer. Car, qu’on le veuille ou non, ce sont bien les opérateurs qui sont responsables des tarifs mis sur les marchés. Alors ils se sont acharnés à gagner des volumes de passagers de plus en plus considérables et, pour cela, de chercher les moyens d’afficher les tarifs les plus attractifs, même si ces derniers n’ont souvent aucun sens économique. Poussées par les compagnies « low costs » bâties à partir d’une feuille blanche, c’est-à-dire sans la contrainte du passé, et par conséquent capables d’équilibrer leurs charges avec des recettes moindres et des modèles nouveaux, les compagnies traditionnelles se sont lancées dans une course aux artifices pour mettre sur le marché des tarifs au moins comparables. Pour ce faire, elles ont utilisé deux moyens essentiels : le « yield management » qui permet d’afficher n’importe quel prix à n’importe quel moment et l’arrêt des commissions aux distributeurs, en clair les agents de voyages. Le résultat est incontournable, les prix ont été tirés vers le bas par les distributeurs lesquels ont à leur disposition des comparateurs tarifaires performants, alimentés d’ailleurs par les transporteurs. Dès lors, ils ne permettent plus d’obtenir une rentabilité raisonnable pour un secteur très demandeur de capitaux. Pour un retour aux commissions aux agences La solution réside dans deux mesures finalement pas si difficiles à prendre. D’abord arrêter cette folie de multiplications tarifaires qui ont conduit à déconnecter le produit de son prix de vente, à l’inverse de tout ce qui se pratique dans la plupart des secteurs d’activité. De très nombreux tarifs ne servent qu’à obtenir un effet d’annonce destiné à attirer les clients afin de leur vendre au prix fort les services annexes. Et puis il faudra bien que les compagnies se décident à revenir à la commission pour les agents de voyages. Certes il n’est pas question de les rémunérer sur les bas tarifs, mais il serait plus qu’utile, je dirais même vertueux de le faire pour les prix les plus élevés. Tout le monde peut comprendre que si les agents de voyages retrouvaient une commission de l’ordre de 7% sur les tarifs affaires, prémiums ou plein tarifs économique, ils auraient tendance à les proposer, et même à les promouvoir, auprès de leurs clients, alors que pour le moment ils font l’inverse, car ils doivent appliquer des frais de dossiers qui seuls leur permettent d’équilibrer leurs comptes. Quoiqu’elles en pensent, et même avec les outils informatiques actuels, les compagnies aériennes doivent accepter le fait que 70% des clients sont ceux des agents de voyages et ces derniers peuvent grandement les orienter pour leurs achats. C’est par la conjonction des actions de tous les acteurs de la production et de la distribution du transport aérien que l’on arrivera à la nécessaire remontée des tarifs… en douceur.
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Jean-Louis BarouxJean-Louis Baroux est le fondateur du premier réseau mondial de représentations de compagnies aériennes, présent dans 170 pays. Il est également le créateur et l’animateur de l'APG World Connect. Archives
Juin 2022
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